Grande victoire jeudi pour le monde du logiciel libre. Dans une décision étoffée et sévère, le juge Denis Jacques, de la Cour supérieure, conclut que la Régie des rentes du Québec a mal agi en octroyant sans appel d’offres un contrat de 722 848$ à Microsoft pour l’achat de logiciels qui auraient pu être remplacés par des concurrents issus du monde du logiciel libre.

Démontant un à un les arguments et requêtes avancés conjointement par la RRQ, Microsoft, le Centre de services partagés du Québec (CSPQ), le revendeur de Microsoft et même un représentant du procureur général, le juge Jacques établit que «la Régie cherche à passer outre à l’appel d’offres et à aller de l’avant avec son choix Microsoft».

À l’origine du débat se trouve un avis d’intention émis par la Régie le 21 décembre 2007, avisant tous les partis intéressés qu’elle souhaite se procurer des produits Microsoft, à savoir spécifiquement les licences pour l’utilisation du système d’exploitation Windows Vista, de la suite bureautique Office 2007 et du logiciel de gestion Visio 2007.

Cyrille Béraud, président de Savoir-faire Linux, une entreprise qui se spécialise dans l’implantation de solutions utilisant des logiciels libres, notamment Linux et Open Office, se met alors à questionner les responsables du projet à la RRQ et tente de les convaincre de plutôt lancer un appel d’offres qui lui permettrait de démontrer qu’il peut offrir une solution comparable à moindre coût.

Malheureusement pour lui, les fonctionnaires de la Régie ne veulent rien entendre, leur choix étant déjà fait, observe le juge Jacques.

La Régie va même jusqu’à faire appel à une firme externe, en l’occurrence CGI, pour l’aider à contrebalancer les arguments de M. Béraud, en prenant bien soin de préciser que cette demande doit rester confidentielle, comme en témoignent divers extraits de courriels soumis en preuve. Un fonctionnaire de la Régie, François Lemelin, écrit à Benoit Dubé, employé de CGI, que la Régie aimerait «vérifier avec un expert de CGI en Linux/OpenOffice/OpenSource la "solidité" de sa réponse (NDLR: à M. Béraud) et même avoir de nouveaux arguments pertinents».